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6 mars 2011 7 06 /03 /mars /2011 18:42

 

 

Lorsque je trace le premier trait sur la page blanche,

Lorsque j’écris la première phrase,

Lorsque je pose la pointe du foret électrique sur la forme d’étain,

Je ne sais pas.

 

Je ne sais pas quelle sera la suite,

Je ne connais pas la fin.

Je ne vois pas le chemin.

 

Je laisse ma main courir sur le papier,

Je la laisse suivre des vibrations inconnues.

 

Qui inspire, qui crée, qui guide la main ?

Quelle est l’action du cerveau, et celle du ventre ?

 

Parfois miracle, souvent malédiction,

Les yeux aveugles devant les formes à venir,

La main infirme réanimée par des phrases futures.

 

Le cœur lourd qui s’allège un peu lorsque le geste est achevé.

 

Et rien qui puisse être expliqué.

 

Alors, tu crois ne plus jamais pouvoir rien écrire.

 

Et puis ta main reprend le stylo et les mots viennent.

D’abord lentement, comme si le moteur s’était grippé,

Puis de plus en plus vite, de plus en plus chaud.

 

Tu ne sais jamais si tu en sortiras guéri ou meurtri plus encore,

Tu écris.

 

Tu ne t’inquiètes pas de savoir si c’est du meilleur français,

Du meilleur goût, du meilleur tout,

 

Tu alignes les phrases comme elles arrivent.

Tu ne cherches pas à faire beau.

Tu alignes.

 

Les images surgissent en surimpression, en sursensation.

Les mots répondent aux mots.

 

Descendre en soi (des cendres en soie) pour trouver l’énergie. Douloureux.

La herse qui lacère la terre sèche avant l’ensemencement.

Se féconder cycliquement.

 

Apprendre et réapprendre les gestes.

Naître et pourrir, puis renaître.

 

Inventer Son monde pour affronter Le monde.

Inventer Sa vie pour affronter La vie.

Ton univers intérieur est aussi grand que l’univers tout entier.

Qu’il sorte de ton cerveau-ventre.

Qu’il sorte.

 

Ecrire vite, surtout parce que le temps est compté (conté ?).

Ecrire vite, ne pas perdre de temps en enluminures.

 

Et remonter la rue Oberkampf les mains dans les poches.

Et remonter le temps.

 

Ecrire pour témoigner, pour transmettre ?

Parce que tu crains que tout ça n’ait servi à rien ?

Parce que tu crains ?

 

Mestengo est fatigué.

La mort ressemble peut-être à un dernier shoot,

Mais pas sûr, alors évitons.

Alors, écrivons.

Rassembler ses forces. Rassembler ses forces.

 

Se redresser encore une fois.

En chassant les « A quoi bon ? » .

En affrontant les juges et les cons.

 

Montrer au fils qu’il ne faut jamais renoncer, jamais.

 

Baisser la tête, non pas pour se soumettre,

mais pour se protéger.

Un pas à gauche, un pas à droite. Respirer.

Toujours en garde.

En garde de soi.

Ne jamais se perdre.

 

Prendre des coups. En donner moins, mais juste.

 

Baisser de rythme, souffler, réaccélérer.

Entendre les coups de gong qui lui disent : « Repose-toi. »

Ne pas les négliger comme tu les as négligés.

 

Montrer au fils qui montrera au fils du fils.

 

Dur au mal, doux au bien, il sera.

Plus que tu ne l’as été.

 

Tu auras ouvert maladroitement le chemin.

Lui s’y engouffrera et taillera sa route.

 

 

 

© Le Mestengo

 

 

 



 

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commentaires

A
<br /> bah!!! c'est super super super C'est un rêve J'adhère<br /> <br /> <br />
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R
<br /> J'ai beaucoup aimé les derniers paragraphes. Comment donner une direction à nos enfants, les amener sur des chemins de traverses, caillouteux mais vivants, sans les asservir à nos causes .... sinon<br /> perdues tout du moins égarées des sentiers bien tracés.<br /> <br /> <br />
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